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Ostéopathie, massothérapie et mécanique du cheval

En collaboration avec Magali Gagnon de Kinéhorse.


respecter la locomotion innée du cheval

Le Dr Pierre Pradier fut un précurseur en matière de mécanique équestre. Un grand homme de cheval, vétérinaire de son état et cavalier raffiné. Il a consacré sa vie à mieux comprendre le cheval. Il était un mentor incroyable, autant avide de connaissance que de partage. Je ne vois pas de meilleure introduction à cet article que de vous laisser quelques lignes avec ses mots à lui :

Un quart d’heure après sa naissance, le poulain marche au pas, trotte, galope et recule par diagonaux successifs : ce sont ses allures naturelles, élaborées par son inné locomoteur spécifique.

Il est évident que, chez ce poulain pas plus que chez le cheval plus tard, ces allures rendues en quelque sorte obligatoires par un inné contraignant ne sont conscientes : il optimisera à chaque instant les contraintes du monde à son stock chromosomique

Que faut-il comprendre là-dedans ? Tout simplement que le cavalier doit composer avec l’inné locomoteur de sa monture et surtout le préserver. Entre les lignes, il me semble aussi percevoir un autre message : celui de l’importance de la motricité chez le cheval. Car oui, le cheval a un grand besoin de motricité. C’est un animal de qui aligne les kilomètres tout au long de la journée. 

Les contraintes de la vie de cheval d’hommes (travail pas toujours adapté, espaces réduits, matériels mal ajustés) vont pervertir cet inné locomoteur avec le temps. De là peuvent apparaitre les irrégularités d’allure et la baisse de performance, voir une boiterie. 

comment aider le cheval à mieux s’utiliser?

Celui qui côtoie les chevaux a certainement déjà entendu cet adage : « pas de pied, pas de cheval ». Je pense que « pas de dos, pas de cheval » ferait aussi l’affaire. En effet, le dos du cheval agit comme la transmission de votre voiture. Sans lui, la propulsion est avortée, le cheval est sur l’avant-main, sans équilibre ni constance ni cadence. Le dos doit donc être libre pour laisser passer le mouvement vers l’avant. 

Des études faites au CIRALE (institut spécialisé en boiterie français), bien que portant sur un autre sujet, ont révélé que nous étions dans l’erreur. Des fers à capteur de pression ont prouvé que le cheval, au naturel, portait jusqu’à 70% de son poids sur l’avant-main et le reste sur l’arrière-main. C’est énorme ! Alors maintenant, rajoutez encore là-dessus les 80 kg du cavalier. Vous comprendrez que les risques de lésion ostéopathique ou encore d’arthrose sont importants sur l’avant-main. 

Enseigner au cheval à se rasseoir

L’équilibre sur l’arrière-main permet au cheval de se mouvoir avec beaucoup plus de facilité. Quand le cheval est « assis » sur son arrière-main tout devient plus facile. C’est ce que l’on appelle, en équitation, le rassembler. Un des grands mots de l’équitation.

Dans cette attitude, le cheval reporte son poids sur son arrière-main et soulève légèrement son avant-main. Le général L’Hotte disait que le cheval était alors prêt à déplacer sa masse dans n’importe quelle direction. En effet, dans cette position, étant donné l’élévation de l’avant-main, il est très aisé pour le cheval de changer de direction ou changer sa vitesse. Le rassembler provoquer ce que l’on appelle une dissociation des diagonaux. C’est-à-dire que les postérieurs touchent le sol avant les antérieurs. Dans l’attitude du rassembler, les abdominaux du cheval ainsi que la zone lombo-sacré est fortement mise à contribution.

Le rassembler se prépare et est le fruit d’un long travail. Mais il permet au cheval de se renforcer pour ne pas souffrir physiquement du poids du cavalier sur son dos. Cela en fait un mal nécessaire. 

Dans ma pratique, je vois énormément, trop, de chevaux avec des douleurs dorsales. Entraînement mal adapté, selle inadéquate, travail précoce. Alors comment les thérapies manuelles peuvent-elles aider et comment mieux gérer le physique de son cheval ? Les thérapies manuelles peuvent-elles préparer le cheval à l’effort ? 

la massothérapie équine

Le massage n’est pas juste un outil de détente, il peut aussi être thérapeutique et est d’une grande aide pour redonner toute sa mobilité au cheval. A mon sens, le bien-être passe par un équilibre physiologique, afin que le cheval puisse se mouvoir sans douleur ni restriction. Le cheval est un animal de mouvement. Il est nécessaire à sa santé mentale comme physique. Le cheval illustre à merveille la maxime d’Aristote : le mouvement c’est la vie.

La massothérapie a des effets multiples. En oxygénant les tissus, elle assouplit, relâche les tensions. Ceci contribue à une meilleure mobilité articulaire mais aussi à une diminution des douleurs. Toutefois les bienfaits de la massothérapie ne se limitent pas juste à la locomotion. Elle améliore la digestion et le transit, augmente la capacité respiratoire, renforce l’immunité et soutient la circulation sanguine comme lymphatique. 

l’osthéopathie pour le cheval

L’ostéopathie est un autre outil à disposition du cavalier. D’après Andrew Still, qui fut le père de l’ostéopathie, un traitement manuel repose sur le principe que seul un être vivant dont toutes les parties disposent d’une entière liberté de mouvement peut conserver une santé optimale. Les cicatrises, les blessures et les chutes sont également des sources de blocages. Au début, il pourra s’agir juste d’une légère perte de mobilité, qui peut passer inaperçue. Mais si le blocage persiste, l’articulation concernée sera sollicitée de manière inappropriée. La microcirculation en souffrira et pour finir c’est le cartilage articulaire qui ne sera plus irrigué comme il le devrait. C’est la porte ouverte à l’arthrose. 

Les blocages d’ordre ostéopathique peuvent avoir d’autres conséquences. Pour vous donner un exemple, un blocage au niveau de la C2, la deuxième cervicale, peut entrainer de fréquentes coliques. Une névralgie provoquée par une compression d’un nerf trijumeau provoquera du head-shaking. Un blocage de nuque va raidir le cheval dans sa globalité, sans forcément de boiterie apparente. 

Une grosse étude menée en 2006 portait sur les impacts directs d’une séance d’ostéopathie. Les chercheurs ont pris 26 chevaux, toujours présentant un dysfonctionnement de l’arrière-main. L’étude a été effectuée en double aveugle. La moitié des chevaux ont été traité et l’autre non. La mobilité des chevaux a été testée grâce à des capteurs et des images vidéo. Les chevaux ont été testés sur une période de 20 jours après manipulations. Les effets de l’ostéopathie se sont vite fait sentir avec une différence notable en qualité de propulsion chez les chevaux manipulés. 20 jours après le traitement, les chevaux traités démontraient encore une amélioration de leurs allures alors que ceux non manipulés présentaient un défaut accentué de propulsion. Les chercheurs en sont donc venu à la conclusion que l’ostéopathie améliorait nettement l’activité dorso-ventral (rebond), la propulsion. Cependant, ils ont également constaté une irrégularité au galop dans les 10 jours après les manipulations sur les sujets testés.


 

L’entraînement du cheval doit d’abord et avant tout être adapté

Il est important de comprendre que toutes les thérapies du monde ne seront jamais en mesure de composer un mauvais cavalier. Par conséquent, pour optimiser la santé de son cheval, le cavalier peut utiliser l’ostéopathie, la massothérapie. Mais pas uniquement. Une formation adéquate du cavalier est nécessaire pour assurer le confort du cheval et ses performances. 

Un entretien régulier du cheval en massothérapie et en ostéopathie permet de diminuer de façon significative le risque de blessure, de maintenir une santé optimale et d’augmenter le bien-être du cheval.

Alors pourquoi s’en passer ?